Pour cette deuxième invitation à écrire, nous vous proposions de découvrir l’univers de Marin Postel.
Dominique Osmont vous proposait de raconter en 10 lignes maximum une expérience réelle ou fictive où la mer joue le rôle principal.
Si la mer est un mur, alors
Quel sera mon horizon?
Si la mer est un mur, alors
Je prendrai un marteau.
Si la mer est un mur, alors
Je frapperai de toute mon âme.
Si la mer est un mur, alors
Je briserai les barrières.
Si la mer est un mur, alors
Je crierai en silence,
Ma quête d’absolue LIBERTÉ.
Christian LEVEZIEL
« La mer est un mur »
» La mer est un mur » m’écris tu.
Mais comment peux tu?
Notre enfance Marine, t’en souviens-tu?
Notre absolue liberté en barcasse par tous les temps, pour toutes les virées ?
Nos courses dans les algues à marée basse, l’odeur du varech, la saveur des coques
juste pêchées.
Et ce silence du bruit des vagues nos nuits sur la plage.
Non, je ne te suis pas.
Je sais, je sens ton chagrin, ta colère, voir tous ces migrant tenter la traversée, ces âmes
englouties et toi, sur ce bateau, empêché de les sauver.
Mais un Breton ne se laisse pas aller.
La mer est vivante, ses marées, ses vagues, même immenses, ses tempêtes, ses
brouillards, ses courants , ses ressacs
, la mer: un anti- mur, une immensité liquide, une puissance d’eau, et bleue ,et verte, et
noire, et or, l’Amour de ta vie!
Ressaisis-toi ,ne me dis plus jamais que
» La mer est un mur ».
Odile Germain
Si la mer est un mur, alors que puis-je faire ?
Escalader à mes risques et périls cette herse qui se dresse ?
Amadouer cet immense dragon aux épines insidieuses en lui offrant des chants venus
des temps anciens ?
M’est-il permis de croire que je puisse fissurer cet obstacle absolu ?
Si je tournais le dos, opposais mon silence ?
La chair de poule court sur ma peau au teint de parchemin.
Je cherche.
À me frayer un chemin apaisé pour ouvrir l’horizon
Véronique Pedrero
Si la mer est un mur, alors je suis une barrière de silence qui se fracasse sur ses
mâchoires
Mais si la mer daigne rogner ses arrêtes rocheuses pour me faire révérence, à l’horizon le
ciel s’évase
Si je me risque à grimper sur le pont, les abysses insondables ne me font
plus obstacle pour une évasion spectaculaire
C’est le moment d’enfourcher la liberté, de piquer une tête vers l’absolu où se rejoignent
les âmes
Tout devient alors immense et intemporel, propice à une exploration méticuleuse qui
n’aura pas de fin
Véronique Pedrero
Si la mer est un mur, j’enfile ma cuirasse
Si la mer ouvre un mur, j’ouvre mes écoutilles
C’est selon
Selon les jours ou bien selon les nuits
Parfois, nos âmes résonnent sur la corde tendue de l’horizon et même bien au-delà
Parfois, c’est mission impossible
Le silence, immense, s’épaissit tels des obstacles infranchissables qui heurtent nos
tympans
Il entrave toute tentative d’évasion et de rencontre
Il oppose son opacité à toute exploration
Il ne me reste plus qu’à me tenir immobile telle une statue de sel au regard absent
Jusqu’à ce que la mer se calme et vienne à moi, sans que je risque un geste
Alors seulement pourra naître le murmure
Véronique Pedrero
Si la mer est un mur, alors je tenterai par tous les moyens de la traverser.
Avant même toutes réflexions, à savoir comment je ferai de cette barrière un lieu par où me sauver, je chercherai à atteindre son rivage, j’emprunterai les sentiers parsemés de ces flores marines, j’irai de mes pieds nus là où les éléments se mêlent, je ne craindrai point le soleil de plomb qui fond sur l’homme comme le rapace sur sa proie, je fixerai l’horizon dans l’absolue confiance d’un ailleurs.
Mon âme accueillera le silence, prête à faire corps avec cette source de vie dans l’exploration de sensations de l’être, je me glisserai délicatement au sein de l’onde bleue, avant de me laisser prendre.
Submergée, inondée, inaudible aux présences terrestres, déchargée de l’attraction du monde, portée par le mouvement, attirée aux profondeurs du néant, j’irai vers l’au-delà, redeviendrai matière, chaînon, cellules.
Là où le souffle prit vie, je perdrai le mien.
Près du commencement, je reviendrai …et traverserai le mur du temps dans la quiétude enveloppante du bain originel.
Pascale GIRAUD
Si la mer est un mur, alors je suis persuadée qu’il n’est pas infranchissable, bien au contraire.
J’ai toujours aimé me plonger dans son horizon immense, m’offrant multiples dégradés de couleurs, de la transparence du bleu turquoise à la soutenance du bleu profond, de l’orange pastel au rouge intense du soleil couchant, où ciel et eau finissent par se confondre et s’unir comme deux âmes sœurs. Lorsque je ferme les yeux, je me laisse enveloppée par l’air
marin m’apportant ses odeurs si caractéristiques, la caresse du vent frais sur ma peau, me replongeant ainsi dans mes souvenirs de vacances, heureuse d’y retrouver réconfort et sérénité. Je reste toujours ébahie par la beauté des éléments, le claquement des vagues sur les rochers, la musique de la pluie, la chaleur du soleil. J’aime la redécouvrir à chaque saison,
chacune différente mais d’une richesse qui m’entraîne dans une évasion sensorielle exquise, un vrai sentiment de liberté totale.
Delphine Ramos
Si la mer est un mur, alors….
Je m’évaderai par le rêve. J’irai à l’assaut des vagues conquérir d’autres mondes. Je franchirai les obstacles, protégée par Poséidon qui apaisera les flots sauvages. La liberté est loin là-bas à l’horizon mais je n’ai pas peur. Les grands oiseaux des mers me porteront sur leur dos, la baudroie des abysses me fera visiter l’insondable. Je gagnerai l’Eldorado, pléthore de promesses, je chevaucherai un mustang, et traverserai dans un nuage de poussière les Grandes Plaines. Les Arapahos
m’accueilleront par des danses et des chants et le soir venu, les âmes s’élèveront dans le silence et la paix.
Claire Deroeck
Si la mer est un mur, alors…. il faut savoir nager à la verticale pour passer l’obstacle en
toute liberté, rire d’avoir passé la barrière du son née sur l’anneau de corail. Cette fois, le
long de l’horizon, les surfeurs cherchent leur vague à la Chambre d’Amour derrière l’hôtel
d’Eugénie impératrice, ils ont endormi notre esprit d’évasion toujours.
Mais où est-elle ? vite, pas de problème d’insondable, quelques mètres face à l’océan
immense, ses cheveux s’étalent à la surface, absolue nécessité de les attraper, dans le
silence je récupère ma fille sonnée par la dernière des vagues. Exploration trop hard pour
elle qui croyait être bonne nageuse avant cette exploration improvisée précipitamment.
La leçon est dure pour nos âmes, malgré l’heureuse évasion finale, l’Océan vient de nous
enseigner que la prochaine fois nous devrons nous méfier plus. SNSM et surveillants de
plage sont des figures essentielles de la Mer !
Claire Deroeck
Si la mer est un mur, alors….
Je m’évaderai par le rêve. J’irai à l’assaut des vagues conquérir d’autres mondes. Je franchirai les obstacles, protégée par Poséidon qui apaisera les flots sauvages. La liberté est loin là-bas à l’horizon mais je n’ai pas peur. Les grands oiseaux des mers me porteront sur leur dos, la baudroie des abysses me fera visiter l’insondable. Je gagnerai l’Eldorado, pléthore de promesses, je chevaucherai un mustang, et traverserai dans un nuage de poussière les Grandes Plaines. Les Arapahos
m’accueilleront par des danses et des chants et le soir venu, les âmes s’élèveront dans le silence et la paix.
Richard Prothet
Si la mer est un mur, alors je ne le fissurerai pas. Je prendrai le temps. Mon temps.
Assise face aux flots sauvages, le bruit du ressac se fait l’écho de mes battements de cœur.
L’été normand est doux et ses vagues déferlent en moi, enveloppant mon âme de ses bras de velours, murmurant des douceurs à mon oreille. Je réalise que je n’avais pas ouvert les yeux depuis des années, maintenant. Pour la première fois, je perçois au-delà de mon propre horizon. C’est de l’iode qui rentre dans mes poumons, mon souffle parle le même langage que le vent de Nord et, et mes voix intérieures s’effacent pour laisser la mer me souffler doucement « Tout va bien. Ne t’inquiètes pas. ». Mes cils se baissent sous ce soleil froid et brûlant à la fois, tandis que l’air marin replace maladroitement une mèche de mes cheveux bouclés. Le mur d’azur qui ondule devant moi restera insondable, puissant et indomptable. Mais je souris en silence, car il est le premier obstacle que j’accepte, et que j’ai appris à aimer.
Manon FORET
Si la mer était un mur, alors … Je ferai tout pour le franchir.
Deux jours que nous voguons sur notre coquille de noix, un muscadet de 6,40 m.
Phil s’est allongé dans le cockpit. Je suis à la barre, confiance absolue.
La mer est calme, le ciel bleu, mon âme s’évade, l’horizon m’offre un camaïeu de bleu et de vert.
Soudain le claquement des vagues sur la coque m’alerte, je regarde derrière moi, mon estomac se noue. Des vagues se dressent, immenses, terrifiantes, telle la gueule d’un monstre prêt à m’engloutir.
»bordel de merde ! » crie Phil. Seule sa tête surgit du cockpit, les cheveux hirsutes.
» Nous n’avons pas progressé » constate t-il en scrutant la côte.
Il reprend la barre, s’y cramponne. Moi, je suis tétanisée.
A la nuit tombante nous arrivons enfin, exténués, devant le Tréport, mais devons rester à la cape et attendre la marée montante.
Le ciel zébré de rouge, jaune, mauve nous nargue. Le vacarme d’un feu d’artifice nous agresse.
Nous sommes le 13 juillet et j’ai 30 ans aujourd’hui .
Armelle LEROY
Si la mer est un mur, alors, je me suis heurtée à sa barrière d’ombres.
J’avais six ans. La mer, je la connaissais seulement du bord, comme on connaît un livre qu’on n’a jamais osé ouvrir. Lui, l’eau l’avait avalé en riant puis recraché sans une griffure amère. J’ai sauté de la jetée — par bravade, par orgueil, par peur de rester en arrière.
Parce que cet été-là sentait le sel et l’aventure. La liberté.
Le plongeon m’a arraché un cri étranglé. L’eau, elle, m’a pris tout le reste. Glacée. D’un bleu vert absolu strié d’ombres. Elle m’a happée comme une bête, par les chevilles d’abord, puis les bras, et enfin les poumons. J’ai senti mes yeux s’écarquiller jusqu’à la rupture. Mes oreilles se sont remplies d’un monde étrange — un monde étouffé, immense.
Fait de battements flous, d’âmes flottantes. Mon cœur, affolé.
Je me souviens du goût : ferreux comme une plaie qu’on lèche. J’ai voulu hurler.
Mais la mer n’écoute pas.
Puis deux bras. Musclés. Chaleureux. Qui m’ont remontée comme on arrache une racine.
C’est par elle que je vomis des vers, depuis. Elle m’a crachée vivante. Mais, autre.
Elle m’a donné son encre — noire, visqueuse, insondable — et depuis, j’écris avec le sel au bord des lèvres.
La mer m’a faite : conteuse d’écume, fille du sel, née mille fois sur le rivage de pages mouillées.
Anne Fabregoul
Si la mer est un mur alors j’ai franchi l’obstacle en explorant les fonds marins. Seul le silence absolu m’accueille.
Les dorades, mérous et de nombreuses autres espèces de poissons me suivent en formant un étrange ballet multicolore autour de moi. Ils se dirigent vers la barrière de coraux où le rose le bleu s’entremêlent telle une aquarelle.
J’ai une sensation insondable de vide, d’évasion de ne faire qu’un avec toutes ces âmes marines qui vivent dans ce monde profond sans horizon mais tellement vivant. Il est temps de remonter.
A la surface, le soleil émerge de la brume, le vent dépose sur mes lèvres un goût épicé et me fait rêver de contrées lointaines dans la clarté limpide du petit matin. Le flux et reflux des vagues résonne comme une douce mélodie. Dans le lointain, un voilier bondit légèrement sur l’écume sonore et s’en va toutes voiles déployées.
Je prends le chemin du retour avec une immense gratitude envers cette nature fantastique.
Sylvaine Beaumelle
Si la mer est un mur, alors comment m’en aller ?
Je vais partir. Je dois partir. Je dois quitter la ville, abandonner mes rêves de musique, d’écriture et vivre en liberté sur d’autres terres que celles qui m’ont vu naître.
Je sais que mon salut passe par la mer, mais… Ils ont construit un mur tout le long de la plage. C’est plus qu’une barrière que l’on peut escalader. Il ferme l’horizon et les bateaux n’accostent plus sur la plage dans le silence de la nuit.
De la mer, seuls persistent son odeur que le mur n’arrête pas et le bruit de son ressac.
Elle est là, tout près. Son immensité m’effraie mais elle n’est pas un obstacle insurmontable. Je dois lui faire confiance pour qu’elle me porte vers mon destin, ailleurs.
Je partirai. Je suivrai son rivage. Je trouverai le bateau qui me transportera dans le pays où je n’aurai plus jamais peur.
Marie Aussiette
Si la mer est un mur, tu es le sommet de l’écume.
Mouvante, changeante, au gré de la houle, obstacle à la brume.
Ce jour où tu m’a avoué t’être noyée dans cette immense jungle de béton
Recouvrant l’horizon, qui t’empêchait de sentir cette lame de fond,
Cette brise salvatrice, ce frisson ardent du sel sur tes blessures,
La brûlure rappelant à ta peau la vie, ton cœur meurtri battant, si pur.
Tes cris à la nuit, perdus dans le silence du goudron, l’âme au large,
Tu as finalement ouvert les yeux au souvenir de ces jours sages
Où le soleil chauffait ton visage, sans voiles pour l’assombrir.
Tu as remonté ton ancre, abattu ta digue et pris le large pour enfin t’enfuir
Bastien Dumez
Si la mer est un mur alors …
Si la mer est un mur alors je n’y verrai que du bleu et je repenserai aux bleus de ma vie, à mon âme insondable et meurtrie, à l’horizon immense qui frôle la mer, la mer battue par tous les vents et les remous. J’ai souvent écouté la mer. Le clapotis de mes rêves qui sont venus s’échouer sur la plage, un obstacle à ma liberté qui fuyait entre mes mains, m’échappait et me laissait avec des souvenirs teintés d’algues et de mélancolie. Si la mer est un mur alors je franchirai cette barrière invisible et mon esprit vagabondera aspiré par un ailleurs fait d’absolu, de grandes traversées, d’îles ponctuées d’éclairs bleus. Ne pas
attendre. Aller aussi loin que possible, jusqu’au bout de moi-même, dans un territoire où le vent me dirait que la mer est une étrange énigme.
Violette Chabi
Si la mer est un mur, alors je vais traverser ce mur immense pour voir ce qui se trouve de l’autre côté. J’embarque je ne sais d’où, je me hisse sur cette barrière d’eau afin de mieux sentir les parfums de ses embruns. Je la laisse m’emporter, me ballotter à loisir. Je perds de vue l’horizon, ce n’est pas grave, mon regard est guidé par la maîtresse des lieux. Elle me montre ses profondeurs insondables, et toute une faune éprise de liberté. Je suis émerveillée par le vol plané des albatros, pour eux la mer n’est pas un obstacle. Je vis au rythme du soleil et des intempéries, j’apprécie le silence d’une mer d’huile, je parle aux poissons de mes envies d’exploration. Dans un petit carnet je peins la couleur du ciel pour ne pas l’oublier, le ciel clair des jours ensoleillés, celui des journées grises, et celui des nuits noires aussi. Lorsque les terres sont en vue je fais une escale, avec l’espoir de trouver un environnement différent de celui duquel je viens. Je suis contente de découvrir
de nouvelles cultures et d’autres paysages. Au fil des jours une nostalgie, un manque, un besoin d’évasion s’installent, la mer me rappelle à elle. Je retourne dans son immensité, là où les âmes ne se côtoient pas de trop près. Je poursuis mon chemin, avec la conviction absolue que le voyage est bien plus envoûtant que la destination.
Mel
Si la mer est un mur, alors il faut le franchir. Autant la Méditerranée est accueillante pour la baignade, autant l’Océan me paraît hostile. En effet, il présente dès ses premiers mètres un obstacle formé par des vagues qui grondent et dont l’irrégularité de taille et de fréquence provoque en moi une peur absolue. Dommage, car au-delà, l’étendue d’eau
salée paraît calme, immense, promesse de liberté et d’évasion, jusqu’à l’horizon. Me voilà donc, me mêlant à la foule de touristes bruyante qui joue avec les ondes sous l’œil attentif de maîtres-nageurs. Tout d’un coup, je n’en peux plus de cette barrière grouillante d’humains et je fonce. Je saute au-dessus de la première vague, je plonge dans la seconde, me retrouvant dans un tourbillon insondable où d’autres âmes avant moi ont dû se perdre. Épuisée dans ma lutte, je suis éjectée au-delà du « mur » et me ressource en faisant la planche, explorant de mes yeux le vaste ciel dans un silence relatif.
Isabelle Françon Perez
Je suis là face à la Manche où je viens de plonger. J’aime cette eau froide au goût salé. Je fixe l’horizon immense et j’imagine la côte anglaise. Je ferme les yeux et mes oreilles s’emplissent des cris stridents des goélands. Je pense au film Welcome avec Vincent Lindon, maître-nageur à Calais qui entraînait un jeune réfugié kurde en piscine afin de franchir cette mer obstacle, cette mer barrière pour rejoindre le Royaume Uni. Vaine tentative d’évasion vers un rêve de liberté irréalisable. En repensant à l’issue tragique de ce terrible destin je songe au sort de ces milliers de réfugiés refoulés , abandonnés qui tentent malgré tout de survivre. Une vague de tristesse et de colère me submerge. Je plonge encore dans cette eau sombre pour tenter de l’apaiser.
Évelyne Creux
Hurlante
Si la mer est un mur, alors je ne te suivrai pas. Pas cette fois.
Même pour un pas de deux. Obstacle infranchissable.
Je t’attendrai de ce côté-là, sans horizon, dans ce silence de l’absence, absolu, insondable. Je t’attendrai sur le sable.
Je sais qu’un jour tu reviendras de ce monde dans lequel les âmes sensibles errent livides, face à la puissance des flots.
L’appel éraillé des mouettes, insistant, envoûtant, semblable à celui des sirènes, se perd dans le fracas des vagues.
Sur mes lèvres, le goût salé de la mer et des larmes…
Raisonne encore le cri de la corne de brume, incessant, lugubre, longtemps après le lever du soleil… le naufrage au bout de la route.
Geneviève Protin
AQUA LAND
Si la mer est un mur, alors j’entends un murmure, presque un silence, très loin là bas, il y a si longtemps, une vibration, un battement de cœur cotonneux, des borborygmes en bulles de clapotis, je vois des sinusoïdes irisées, je sens le poids de l’insondable profondeur, de sa force mouvante, j’avance vers la lumière, je hurle un cri de Vie, je respire l’immense liberté d’être Moi, j’ai quitté la mère, cherché la mer universelle, celle de tous les possibles, bleue noire calme grondante excitante pleine de tous les Autres apaisante et dangereuse, qui avive l’absolue conscience du chemin parcouru, des défis à venir, sur la plage je scrute à l’horizon le navire qui t’éloigne.
Eric PROTIN
Si la mer était un mur alors !
Difficile d’imaginer qu’a l’horizon d’autres îles lointaines abritent des cultures différentes des nôtres.
Derrière ces barrières d’un bleu azur et profond, le ciel se fond dans cette immense étendue d’eau.
Mélange de turquoise dans un silence absolu.
J’ai le sentiment étrange que les âmes chargées d’iode et de sel que fut la vie avec ses tourments et ses merveilles s’y retrouvent pour un dernier ballet de douceurs spirituelles et de liberté a l’infini.
Marie Claire
Si la mer est un mur, alors comment vais-je faire pour te rejoindre sur cette île inconnue ? L’absurdité de la promesse balbutiée au creux d’un sanglot lors de ton départ résonne dans le silence épais de ma solitude. L’émerveillement
ressenti à tes côtés face à l’immensité des flots animés d’un mécanisme immuable, gage d’éternité, fait place à l’impuissance et à la désolation. Le paradis mouvant ruisselant de sel et d’écume, symbole de liberté pour nos corps allégés, devient obstacle. Le vent piquant parfumé d’embruns que j’espérais complice de mon évasion s’érige en barrière et s’oppose à mes rêves.
J’ai neuf ans, plantée sur la plage je tiens tête au chagrin. Et je sens naître en moi une puissante soif d’absolu, éveillée par la magie de ma rencontre avec l’amour et la mer.
Christine Gillet
Si la mer est un mur, alors je n’ai rien compris. Rien du tout. Moi, j’ai toujours regardé la mer comme une porte ouverte sur l’horizon, un tremplin vers un monde enfin agréable à vivre, un silence annonciateur de liberté. Et maintenant, là, debout sur cette barque entassé depuis trois jours avec des dizaines d’autres rêveurs en fuite, on me dit que je ne peux pas traverser, on m’affirme qu’il y a une barrière au beau milieu des vagues, et qu’il n’existe aucun moyen de la franchir ? Je m’exclame, je m’emporte, et la mer soudainement s’emporte avec moi ! La barque tangue, les rêves d’évasion se brisent contre la houle, et l’odeur salée d’un échappatoire encore une fois inaccessible me prend la gorge. Cette fois, je ne renoncerai pas.
Jane Marchand
Si la mer est un mur, alors l’océan est une falaise, une barrière qui parait inaccessible, et pourtant ce matin là j’allais découvrir que, malgré tous les obstacles, faire jaillir au milieu de l’océan une merveille était possible.
Je prenais le bateau pour une visite touristique du phare de Cordouan situé dans l’Estuaire de la Gironde. Nous avancions en pleine mer sans âme qui vive autour de nous, l’horizon pour seul décor. Soudain au milieu de l’océan, le phare apparu dressé vers le ciel, majestueux, mystérieux, insondable, immense. Par la magie des marées l’océan s’ouvrait devant nous me laissant sans voix. Le bateau jeta l’ancre à proximité. Je descendais et marchais dans l’eau dans un silence absolu pour rejoindre ce géant perdu au milieu de ces eaux profondes. Un immense banc de sable se formait le mettant à nu et
me permettant de commencer mon exploration. Fascinée par tant de beauté, j’arpentais maladroitement les rochers découverts qui m’offraient ici une huître, là une moule que je dégustais les yeux fermés.
Cette évasion magique me rappelait et me faisait oublier à la fois que j’étais là, en toute liberté, au milieu de l’océan. Dans quelques heures, tout sera recouvert et la nature retrouvera son apparente solitude. Mais pour l’heure, je me lançais à l’assaut de ce monument vieux de plus de quatre siècles, pour découvrir son histoire hors du commun.
Cordouan le roi des phares, le phare des rois.
Annick Dutérail
Si la mer est un mur, alors je suis prisonnière, moi qui vais si souvent à sa rencontre.
Elle m’inspire un sentiment de liberté, d’infini, de calme.
J’ai fait de cette mer une amie. Je marche à coté d’elle, sentant le sable sous mes pieds.
Elle dont l’humeur est changeante au gré des flots, des nuances de couleurs, des reflets, jamais identiques.Je suis à l’écoute de son silence et du bruit de ses vagues qui emportent mes pensées vers l’horizon.
Si la mer est un mur, alors cette mer/mur qui me fascine et m’attire devient un obstacle à mon rêve d’évasion et aussi à celui de toutes ces personnes qui fuyant leur pays, au mépris de leur vie n’ont qu’un but : la traverser pour trouver, croient-ils la liberté.
Que leur reste-t-il, arrivés au pied du mur /mer ?
Annie Faure
Si la mer est un mur, alors je le façonnerai pour que nos âmes se rencontrent encore et encore
Je le contournerai en nageant dans son bleu immense pour revoir tes yeux assortis
Je l’escaladerai pour embrasser la liberté de te retrouver de nouveau fébrile et fou
Je le percerai en silence pour que personne n’apprenne notre évasion en catimini
Je le décorerai pour embellir mon horizon et dessiner ton corps sensuel et doux
Je l’apprivoiserai pour sentir tes embruns salés de transpiration sans chatouillis
Je le briserai pour adoucir les vagues qui me tourmentent jusqu’au moindre remous
Mais dans l’absolu, si la mer était vraiment un mur, il ne resterait pas longtemps un obstacle entre nous car notre attirance se fiche des barrières.
Virginie Escoffier
Si la mer est un mur, une barrière séditieuse, elle me livre un combat inégal, houleux.
Mes pieds foulent la page que la brise tente de faire fuir. Je me penche pour m’en emparer quand un petit crabe translucide s’aventure près de ma main, pointe ses yeux globuleux sur cet obstacle insolite puis, une fois sa curiosité assouvie, se retire à vive allure pour s’immerger dans le trou d’eau qui le protège des intrus. Ma page blanche aurait pu offrir un refuge romanesque à ce crabe aventurier mais elle me toise, me provoque, me nargue de sa blancheur absolue : mon envie d’écrire a fondu au soleil malicieux de ce début d’été.
Je me pose sur le sable tiède qui accueille ma torpeur et me laisse bercer par le ressac.
J’aime cette heure matinale où la plage se réveille, vierge de serviettes et châteaux de sable, où le cri des goélands perce le silence éthéré qui l’habite encore. J’effleure la page blanche de mes doigts gourds puis m’abandonne à une torpeur enivrante quand la sirène incongrue d’un bateau m’extirpe brusquement de ma rêverie, trouble mon évasion chimérique. Mon regard irrité s’adoucit devant un vieux pêcheur à la marinière défraîchie qui arpente la plage, pieds nus dans le sable humide, seau à la main, pour débusquer une poêlée de couteaux qu’il partagera avec les copains. Son visage buriné me touche, la page blanche se remplit.
Catherine Spinard
Si la mer est un mur, alors je dois le franchir et réussir mon évasion pour ouvrir d’autres possibles.
Je vais fouler de mes pieds nus le sable humide, sentir chaque grain rouler sous la plante de mes pieds et garder cette sensation en mémoire, la mémoire de ma vie d’avant.
Je vais laisser une dernière empreinte sur cette plage abandonnée et regarder loin là-bas.
Puis respirer l’air iodé à pleins poumons, goûter le sel sur ma peau et enfin, larguer les amarres.
Je veux voir au-delà de l’horizon, plisser les yeux et rêver d’un ailleurs où tout serait possible…
Je veux me perdre dans la mer immense, en quête d’absolu.
Je veux braver la tempête pour renaître différente.
Je veux sentir le vent dans mon dos me pousser vers le large, vers ma liberté.
Je veux éprouver la solitude du marin, le doute, la peur face aux éléments déchaînés.
Puis goûter le silence et savourer enfin le calme après la tempête.
Alors, je me sentirai fière d’avoir traversé et vaincu cet océan de turpitudes.
Françoise Boyat
Si la mer est un mur, alors que sont les falaises contre lesquelles elle s’écrase inlassablement, furieusement ?
Il me faut cette fureur et ces barrières pour éprouver un quelconque plaisir à être face à la mer.
Au milieu d’une plage immense au morne horizon, je m’ennuie, je m’impatiente, je m’en retourne, les nerfs à vif.
Ce va et vient larmoyant m’exaspère.
Fuir la mer reste ma seule évasion pour retrouver la paix de mon âme agitée.
Nicole Lardenet
La Mer à Saintes-Maries-de-la-Mer par Vincent Van Gogh
Si la mer est mur alors je me tiens debout face à lui les pieds dans le sable chaud et humide.
Ce mur représente ma toile posée sur l’horizon qui me sert de chevalet, ma créativité en exaltation.
J’ai peint ce bleu insondable et profond du ciel avec cette la fulgurance du soleil qui transperce la puissance de la mer. Je vénère ce bleu absolu. Il n’existe aucun obstacle entre ciel et mer quand on peint la splendeur des paysages méditerranéens, la seule barrière c’est la liberté que je m’octroie.
J’ai senti cette énergie du ressac cogner mon cœur, j’étais hypnotisé par cette beauté sauvage et par ces odeurs torréfiées par le soleil. Le tumulte des vagues envoyait valdinguer mes coups de pinceaux, j’étais comme dans une transe, un bateau qui
chavire. Le sel marin me piquait les yeux et le vent hurlait comme un loup ; cette Nature même couchée sur ma toile restait indomptable, je m’en souviens encore tellement j’ai été émerveillé.
Géraldine Jimenez
Si la mer est un mur, alors il mérite d’être franchi. Accompagnée d’une dizaine de touristes, je grimpe sur l’embarcation de bois bleu et blanc. Alors que la mer nous accueille sur ses eaux cristallines, je savoure du regard son immense étendue bleutée.
Notre destination atteinte, j’écoute attentivement les directives de notre moniteur, avant de me plonger dans les flots tièdes et salins de notre insondable hôtesse. Je saute ! Nerveuse et impatiente, palmes aux pieds, masque et tuba en place, je m’étends à la surface, la mer me guide. Je bascule dans le silence sous-marin. Un monde insoupçonnable me dévoile ses trésors cachés, poissons multicolores, étoiles de mers, coraux bariolés. Je poursuis mon exploration et me délecte de chaque découverte. Je sais gré à dame nature de m’offrir son sanctuaire et de m’accorder cette évasion. Le temps et mon trajet s’écoulent cadencés par le bercement des vagues. Bientôt, il faut repartir. Je quitte à regret celle qui m’a ouvert sa porte et son intimité. Une dernière fois, j’admire l’horizon, témoin de la rencontre des eaux et des cieux.
Myriam Finot
« Si la mer est un mur, alors je l’escaladerai : je suivrai son chemin jusqu’à l’aber et là, je retrouverai ma mère. »
Dans le silence de la dune, je chantonnais cette comptine, ivre de liberté. je décidai de passer la barrière du chemin
qui menait au phare. Essoufflée, J’atteignis la pointe du cap que les brumes protégeaient.
A quelques mètres de là , une silhouette se découpait ; sa démarche, quelque peu hésitante, la faisait trébucher sur
les rochers. Malgré ces obstacles, elle se rapprochait.
Un éclair effrayant me fit voir ma mère disparue depuis 20 ans lors d’un périple sur cette côte. Son absence restait une
plaie insondable.
F. MORHAIN